Grâce au travail de cinq habitants du quartier nantais du Vieux-Doulon et le concours des archives de Nantes, un livret téléchargeable gratuitement revient sur l’histoire du site ferroviaire de Nantes-Blottereau. Ils sont cinq. Deux anciens cheminots, un collectionneur, une photographe et un amateur d’histoire locale. Cinq personnes qui habitent ou qui ont travaillé dans le quartier nantais du Vieux-Doulon et se sont unis autour d’une ambition simple : faire connaitre au public le passé cheminot de ce quartier. Depuis 1856, le quartier a été modelé par l’aventure ferroviaire. Dès l’arrivée du train à Nantes en 1851, des cheminots se sont installés ici. Ils ont observant le récent transfert de l’ancienne gare de Nantes-État sur le site ferroviaire de Nantes-Blottereau, renouant avec l’héritage cheminot du quartier, et ont organisé une exposition présentée pendant trois semaines en janvier à la maison de quartier de Doulon.
Passionnés, Carlos Fernandez, Brigitte Gabriac, Joseph Gabriac, Gérard Gautier et Jean-Marie Lavaud ont décidé à la suite de ce succès d’éditer un livret pour permettre au plus grand nombre de se plonger dans cette histoire passionnante. Les membres du Photo Vidéo Club des cheminots de Nantes ont également apporté leur pierre à cet édifice mémoriel en recueillant plusieurs témoignages de cheminots qui sont reproduits dans ce petit ouvrage.
Delphine Agoyer, an- cienne directrice de la maison de quartier de Doulon qui a soutenu activement ce projet, explique en préambule : « Voir débarquer un collectif de cinq habitants qui, ensemble, ont envie de créer une exposition est une au- baine pour la maison de quartier de Doulon ! L’histoire influe sur le quartier encore aujourd’hui et travailler avec des passionnés fut un vrai plaisir. Ils ont titillé, relancé, chipoté, as- ticoté… pour aboutir à une exposition appréciée de toutes les générations. »
Les Archives de Nantes ont financé la ré- alisation de cet opuscule et mis à la disposition des auteurs les nombreux documents préservés par l’institution. Ainsi, les auteurs relatent l’évolution des matériels et des métiers à travers leur quotidien. Ils n’oublient pas les grandes mobilisations sociales qui ont marqué l’histoire du site. Les premières relations entre le quartier et le rail sont attestées dès 1856 avec la présence dans le recensement effectué cette année-là de cheminots (qu’on appelle alors chemineaux).
L’arrivée de ces travailleurs dans cette zone rurale en- traîne une lente évolution sociale, cultu- relle et politique du quartier. Mais l’histoire du site ferroviaire ne débute que bien plus tard. Le 4 novembre 1912, la Compagnie du PO obtient une autorisation ministérielle lui permettant d’acquérir des terrains au Blottereau pour y édifier une gare de triage. En 1914, la compagnie ferroviaire construit un faisceau de voies de garage au Blottereau. Dès février 1916, alors que la Première Guerre mondiale déchire le continent, un décret permet l’acquisition de terrains pour la construction d’ateliers de maintenance des locomotives. Mais c’est surtout avec l’entrée des États-Unis en guerre, le 6 avril 1917, que le site prend toute son importance ferroviaire. L’armée américaine traverse l’Atlantique avec tout son matériel, dont des locomo- tives à vapeur en pièces détachées.
Les infrastructures ferroviaires existantes n’étant pas suffisantes, les Américains obtiennent l’autorisation de construire un dépôt d’entretien des locomotives au Blottereau et développent le site. Après la guerre et le retour du site dans le giron de la compagnie du PO, une centaine de cheminots y assurent la maintenance des locomotives. Leurs familles sont logées à proximité. A partir de 1924, le site se développe avec la construction de nouvelles installations.
Après avoir dressé un inventaire des différents matériels roulants accueillis, les auteurs s’attardent sur une époque sombre, celle de l’occupation pendant la Seconde Guerre mondiale. Les troupes allemandes entrent dans Nantes le 19 juin 1940. Le dépôt SNCF de Nantes et le triage du Blottereau sont rapidement occupés. Certains cheminots choisissent la voie de la résistance.
Ainsi, le premier Nantais fusillé pendant l’Occupation est un cheminot accusé de fournir à Londres des renseignements stratégiques sur le trafic ferroviaire de l’occupant, de favoriser la fuite des prisonniers évadés et même d’avoir participé à un attentat. Du côté des cadres de la direction, certains choisissent en revanche le chemin de la collaboration. Ainsi, le directeur général, M.
Le Besnerais demande la liste des agents suspects d’idées communistes à signaler au préfet, celle-ci est d’ailleurs reproduite dans le fascicule. L’époque est trouble sur le site du Blottereau comme ailleurs dans le pays. Après la guerre, l’heure est à la recons- truction. Le site ferroviaire est modernisé. Au cours des décennies suivantes, son importance s’est quelque peu réduite en raison du développement des transports routiers, mais il a continué à jouer un rôle dans le réseau de fret ferroviaire régional.
Pendant des années, les cheminots se sont succédés marquant de leur em- preinte ce site industriel et l’histoire de la ville. On mesure toute l’importance de cet héritage, en découvrant ce docu- ment téléchargeable gratuitement sur Internet : https://archives.nantes.fr/home/decou- vrir/histoire-memoires-des-quartiers/ doulon—bottiere.htm